[Ecogreen Afrik, 20 juillet 2022] Depuis un an, Nguuré (la nutrition en Fufulde, une langue locale), une farine enrichie à base de produits 100% naturels, est produite dans la région de l’Adamaoua, une région faisant partie des septentrionales du pays avec l’Extrême-nord et le Nord. Cette farine enrichie est destinée au renforcement de l’alimentation des enfants de 6 à 23 mois. Sa valeur nutritionnelle est assurée par l’apport de produits tels que le soja, le maïs, la carotte, le concombre et l’huile de palme rouge qui entrent dans sa composition.
Sur la portée de Nguuré, la promotrice, Oumoul Koultchoumi, indique que « notre projet vise essentiellement à lutter contre la malnutrition au Cameroun. Dans un premier temps, nous ciblons les régions septentrionales et de l’Est du pays ». Le choix de ces régions n’est pas fortuit. Elles sont connues pour abriter des enfants en proie à l’insécurité alimentaire surtout du fait de l’afflux des réfugiés centrafricains et nigérians.

La conquête des régions septentrionales et de l’Est se justifie aussi par les statistiques concernant la malnutrition qui y sévit. En effet, selon les statistiques présentées par le point focal nutrition à la délégation régionale de la Santé publique, la malnutrition chronique affecte 35,4% des enfants de la région de l’Est. D’après l’enquête Standardized Monitoring and Assessment for Relief and Transition (SMART), réalisée en 2018, l’Est est la deuxième région la plus frappée par cette carence juste derrière l’Extrême-nord avec un taux de prévalence de 35,9% et devant le Nord, 30,6% et l’Adamaoua, 28,7%. Toujours en termes des statistiques, l’enquête FRAT, relative à la prévalence en micronutriments chez les enfants indique que 28,6% des enfants âgés de 1 à 5 ans souffrent de la carence en vitamine A, 67, 6% des enfants de 1 à 5 ans souffrent de la carence en zinc et 28,1% des enfants de la même tranche d’âge souffrent de la carence en vitamine B12.
A ces enfants, Nguuré propose donc « une bouillie enrichie préparée à base de produits et recettes locaux sans avoir à dépenser beaucoup d’argent ». « A 1 000 FCFA le sachet de 500 g, les prix sont compétitifs », peut-on entendre dire quelques-unes des consommatrices qu’Ecogreen Afrik a approchées. L’entreprise déclare produire « près de 250 sachets par semaine que nous vendons dans les domiciles ». Ces descentes à domicile s’accompagnent d’« entretiens avec les mamans pendant les consultations prénatales et les accouchements ».
Les objectifs nutritionnels du projet n’occultent pas le fait que, selon la promotrice, « notre projet vise l’amélioration des conditions de vie, encourage la filière agricole, favorise la création des emplois directs et fait entrer des devises par le biais des exportations de nos produits ». Pour y parvenir, Nguuré a été sélectionné parmi la vingtaine de projets retenus par Jesuite Refugee Service West Africa dans le cadre du projet « Résilience communautaire et moyens d’existence durables pour les réfugiés centrafricains et les populations hôtes de l’Est et de l’Adamaoua ».

Pendant près d’un mois, Oumoul Koultchoumi, infirmière diplômée d’Etat, et 19 autres postulants ont été soumis à un programme d’incubation et d’accélération de 20 idées de projets innovants dans les deux régions citées supra. Il est question de les outiller à la défense de leurs idées devant un jury assimilé à un panel de potentiels partenaires. Un exercice auquel s’est soumis l’initiatrice de Nguuré le 20 juillet 2022. Et qu’elle espère réussir avec succès.
Bien que limitée financièrement, la jeune entreprise compte sur ses ressources humaines qualifiées, composée d’une infirmière diplômée d’Etat, un nutritionniste, un comptable et des relais communautaires entre autres, pour attirer des partenaires et être plus performants. Dans un futur très proche, l’entreprise envisage « l’implantation d’une unité de transformation de la farine enrichie à Meiganga ».
Bernard Bangda